(jugement téléchargeable)

Une compagnie proposant des produits d’assurance vie et divers placements financiers est responsable des agissements frauduleux de ses préposés sur le fondement des articles L511-I-III du Code des assurances et de l’article 1384 du Code civil à partir du moment où il est démontré que le préposé a agit dans le cadre de ses fonctions.

Monsieur C était un client habituel de la compagnie le Conservateur et avait toujours eu pour interlocuteur Monsieur M. qui se rendait à domicile pour faire signer les contrats et placements.
C’est ainsi que Monsieur M. a proposé à Monsieur C. des placements sous forme de tontine pour un montant total de 30.000€ et un autre placement de 34.0000€. Ce dernier placement sera bien adressé à la compagnie Le Conservateur. En revanche la tontine de 30.000€ ne le sera jamais.En réalité, Monsieur M. a encaissé les 30.000€ sur son compte personnel et cette somme n’a jamais été encaissée par Le Conservateur.
Monsieur C. a déposé plainte. A cette occasion il découvre que Monsieur M. avait répété ses agissements au préjudice d’autres victimes et que Le Conservateur avait mi fin au contrat qui le liait à Monsieur M.
Cependant Le Conservateur refusait de rembourser Monsieur C. estimant que seul Monsieur M. était responsable des détournements.
Monsieur a donc assigné Le Conservateur devant le TGI de Paris qui a fait droit à l’argumentation de Monsieur C en condamnant le Conservateur à rembourser les sommes encaissées par Monsieur M soit 30.000€ plus les frais de procédure.

Le Tribunal a fondé sa décision sur la responsabilité pour autrui contenue dans les article 1384 du Code civil et L511-1-III du Code des assurances. En effet, Monsieur M était bien un préposé de la compagnie Le Conservateur et le tribunal précise que pour apprécier la situation il convient de se fonder sur des facteurs objectifs (l’environnement du mandataire au moment des faits litigieux) et des facteurs subjectifs(éléments permettant à la victime de déterminer que le mandataire n’agissait pas dans le cadre de ses fonctions).

Concernant les facteurs objectifs, le tribunal retient que Monsieur C connaissait déjà Monsieur M en tant que représentant la compagnie Le Conservateur puisque différents contrats avaient été signés par son intermédiaire (et sans problème) par le passé. Le tribunal retient également qu’au moment où les derniers contrats sont signés Monsieur M est toujours lié par un contrat avec la compagnie Le Conservateur.et que d’ailleurs le placement de 34.000€ est bien envoyé à la compagnie. Le tribunal en conclu que :

« Ces circonstances objectives permettent de retenir que Monsieur M. a perçu le chèque n°xxx de 30.000€ pour des placements de tontine, dans le cadre de ses fonctions apparentes de mandataire non salarié, des sociétés Associations mutuelles Le conservateur et Assurances mutuelles Le Conservateur »

S’agissant des facteurs subjectifs, la compagnie le Conservateur opposait qu’en homme d’affaire avisé, Monsieur C. aurait du se rendre compte que Monsieur M. outrepassait ses pouvoirs, notamment en laissant en blanc le libellé du chèque.
Le Tribunal répond :

« Le fait que Monsieur C. n’ait pas rempli lui-même l’ordre du chèque litigieux n’est pas significatif, car il ne peut être exclu que Monsieur M ait profité de l’échange de divers autres documents (certificat d’adhèsion, autres chèque) pour apposer le tampon LE CONSERVATEUR ce qui était encore de nature à faire croire à la victime que Monsieur M. agissait dans le cadre de ses fonctions. »

La compagnie invoquait également le fait que les contrats de tontine qui étaient proposés auraient du attirer l’attention de Monsieur C. car il leur présentation était manifestement différente des contrats habituellement présentés par la compagnie, et qu’en qualité d’ancien client, Monsieur C. aurait du être alerté.
Le Tribunal rejette également cette argumentation au motif que :

« Il est en revanche exacte que les certificats de tontine remis à Monsieur C. en contrepartie du chèque de 30.000€, pouvaient susciter un certain étonnement, dans la mesure où ils portent le même numéro descriptif précis du produit et qu’ils ne font en particulier pas état des perspectives financières (possibles) pour une épargne investie sur 10 ans et 8 mois. Il n’est toutefois pas démontré que Monsieur C. ait, déjà, antérieurement, souscrit un contrat de tontine, que ce soit auprès du Conservateur ou auprès d’une autre compagnie.
La tontine n’étant pas un contrat d’assurance vie, et étant largement moins connue dans ses modalités, les certificats remis ont d’autant mois attiré l’attention de Monsieur C., qu’ils comportaient l’en tête du conservateur, l’indication de la nature du placement (deux types de tontines, vie et décès), les montants versés (bloqués pendant la durée du contrat) l’identité du conseiller éaynt remis les certificats (Monsieur M ;). Il doit être retenu, qu’au regard de ces éléménts, et malgrè les compétences personnnelles qui peuvent être les siennes (chef d’entreprise selon la défenderesse), Monsieur C a été induit en erreur sur les agissements de Monsieur M ; étant souligné que les bulletins d’adhésion ficitifs n’ont pu être établis qu’après que Monsieur M. se soit préalablement enquis des souhaits du demandeur en matière de placements, ce qui confortait encore le fait qu’il agissait dans le cadre des fonctions confiée par le Conservateur. »

Le TGI de Paris a donc déclaré la compagnie Le Conservateur responsable des agissements de Monsieur M et l’a condamnée à rembourser les 30.000€ détournés plus les frais de justice.
Le conservateur a interjeté appel. L’affaire est en cours devant la Cour d’Appel de Paris.

Le jugement est téléchargeable en cliquant sur le lien
TGI Paris 20_nov_2013

Olivia Chalus
Avocat
Nice 2014